L'image de l'agriculture baule (Côte-d'Ivoire) et les développeurs: «réfèrent» précolonial et réalités historiques
Jean-Pierre Chauveau
Économie rurale, 1982, vol. 147, issue 1, 95-101
Abstract:
[eng] The preponderance of yam in the subsistence production of present-day Baoulé and the valorization of this crop within the representation system of the peasants characterize the agriculture of this region of the Ivory Coast. These aspects determine the image of the precolonial agriculture held by «development» executives as well as «social scientists». The object of this article is to show why this image doesn't correspond to historical realities. The reconstitution from oral traditions and early colonial archives shows a very diversified agriculture which can only be understood in the context of a complex valorization system of all productions where the agricultural element is only a part (gold production and handicraft, especially of cotton ; national and intercontinental trade). Colonization upset old conditions of valorization and introduced foreign constraints thus inducing a regression of the productive assets and inside the purely agricultural sphere discouraged the crops which were the most subject to direct intervention (rice, corn, cotton). Yam had the advantage of a more liberal policy because it didn't fit in with the colonial «model» of a strategic products. . The distorsion of precolonial realities into a stereotyped «precolonial referent» can be explained by a need for justification on the part of the colonizers. At the same time, the Baoulé producers modified their own representations to the advantage of the already culturally valorized yam. Consequently, most so-called «socio- cultural obstacles» date back to 1 900-1*91 8 for the crops most touched by the central government action when a plantation economy was outlined (ground-nuts) which developped outside the rules laid down by the colonizers. Contemporary researchers generally working oh an «ethnographical present» had little chance to escape this caricatured image of precolonial Baoulé agriculture. [fre] La prépondérance de l'igname dans la production vivrière baule contemporaine et la valorisation de cette culture dans le système de représentation des paysans eux-mêmes caractérisent l'agriculture de cette région de Côte-d'lvoire. Ces aspects déterminent l'image que les responsables du «Développement» aussi bien que les «social scientists» se font de l'agriculture précoloniale. L'objet de cet article est de montrer en quoi et pourquoi cette image ne correspond pas aux réalités historiques. La reconstitution à partir des traditions orales et des premières archives coloniales montre une agriculture très diversifiée qui ne se comprend qu'en fonction d'un système complexe de valorisation de la production globale, dont l'élément purement agricole n'est qu'une composante (filières des productions aurifère et artisanale, particulièrement du coton ; échanges internes et intracontinentaux). La colonisation, en bouleversant les conditions de valorisation antérieures et en y introduisant des contraintes extérieures de dépendance, a suscité une régression de l'ensemble productif et, à l'intérieur de l'agriculture proprement dite, a découragé les cultures les plus soumises à son intervention directe (riz, maïs, coton). L'igname a bénéficié d'une politique beaucoup plus libérale parce qu'elle n'entrait pas dans le «modèle» colonial des produits stratégiques. . La déformation des réalités précoloniales en un «réfèrent précolonial» stéréotypé répond à un souci de justification de la part du colonisateur. Parallèlement, les bouleversements subis par les producteurs baule ont déterminé des ajustements dans leurs propres représentations, au profit de l'igname, déjà culturellement valorisée. Ainsi, la plupart des «obstacles socio-culturels» supposés ont pris naissance entre 1 900 et 1 91 8 à propos des cultures les plus touchées par l'action administrative, tandis que s'amorçait une économie de plantation (cacaoyère) qui se développa hors des normes imposées par les colonisateurs. Les chercheurs contemporains, en travaillant généralement à partir du «présent ethnographique», avaient donc peu de chance d'échapper eux- mêmes à une image caricaturale de l'agriculture baule précoloniale.
Date: 1982
Note: DOI:10.3406/ecoru.1982.2848
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