IA: Les déserts médicaux autrement. Vision prospective du rôle disruptif de l’IA et des soins à domicile
Carine Milcent ()
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Carine Milcent: PSE - Paris School of Economics - UP1 - Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne - ENS-PSL - École normale supérieure - Paris - PSL - Université Paris Sciences et Lettres - EHESS - École des hautes études en sciences sociales - ENPC - École nationale des ponts et chaussées - CNRS - Centre National de la Recherche Scientifique - INRAE - Institut National de Recherche pour l’Agriculture, l’Alimentation et l’Environnement, PJSE - Paris Jourdan Sciences Economiques - UP1 - Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne - ENS-PSL - École normale supérieure - Paris - PSL - Université Paris Sciences et Lettres - EHESS - École des hautes études en sciences sociales - ENPC - École nationale des ponts et chaussées - CNRS - Centre National de la Recherche Scientifique - INRAE - Institut National de Recherche pour l’Agriculture, l’Alimentation et l’Environnement
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Le système de santé français, longtemps structuré autour de l'hôpital comme pilier central, traverse une mutation profonde. Sous l'effet conjugué du vieillissement démographique, de la pénurie de professionnels et des avancées technologiques, l'offre de soins se réinvente en déplaçant son centre de gravité vers le domicile des patients. Cette évolution, accélérée par la crise sanitaire, remet en question la notion traditionnelle de « déserts médicaux » – ces zones géographiques où l'accès aux soins est limité – en proposant une approche plus flexible, ancrée dans le numérique et l'intelligence artificielle (IA). Historiquement, la France a construit son modèle sur une logique d'équité territoriale, avec un maillage serré d'hôpitaux et de cliniques. Pourtant, depuis les années 2000, la réduction du nombre de lits (-9,4 % entre 2013 et 2022) et la fermeture de structures locales ont exacerbé les disparités. Aujourd'hui, 7 millions de Français résident dans une zone sous-dotée en médecins généralistes, selon la DREES (2023) . Mais cette réalité statique est bousculée par l'émergence de nouveaux paradigmes : l'hospitalisation à domicile (HAD), la télémédecine et les objets connectés transforment la géographie des soins, redistribuant les cartes entre urbain et rural, jeunes et seniors, précarité et aisance technologique. L'HAD incarne cette révolution silencieuse. En 2023, 168 000 patients – principalement âgés ou en soins palliatifs – ont bénéficié de prises en charge complexes à domicile, évitant des séjours hospitaliers prolongés . Soutenue par des protocoles coordonnés (infirmiers, médecins, aides-soignants), cette pratique réduit les coûts structurels et améliore le confort des patients. Toutefois, son déploiement reste inégal : seuls 1 % des séjours en soins aigus concernent l'HAD, et les technologies de surveillance à distance y sont encore marginales, contrairement à des modèles étrangers comme la Mayo Clinic (États-Unis) ou le CHUV@home (Suisse), où capteurs connectés et IA optimisent le suivi en temps réel. Parallèlement, l'hospitalisation ambulatoire (53% des hospitalisations en 2023) et la téléconsultation (11 millions d'actes de généralistes, libéraux et en centres de santé ; et 8 millions de téléconsultations/télé expertises de spécialistes en 2024) redessinent les parcours de soins . Si ces innovations désengorgent les hôpitaux, elles soulèvent des enjeux d'équité : le reste à charge pour les soins en ville – 35 % non remboursés – pénalise les ménages modestes, tandis que la fracture numérique exclut les populations âgées ou rurales des avancées technologiques. En témoigne le département du Tarn, où seulement 2 % des plus de 80 ans ont recours à la téléconsultation par un praticien libéral, contre 15 % des 18-25 ans. Dans ce contexte, l'IA apparaît à la fois comme une promesse et un défi. D'un côté, elle permet de prédire des crises (diabète, AVC) via l'analyse de données massives, de superviser l'observance des traitements (ex. : comprimés équipés de capteurs) ou d'assister les aidants. De l'autre, elle interroge la place du lien humain, pilier de la relation soignant-patient, et nécessite une refonte complète des formations médicales pour intégrer ces outils. Face à ces bouleversements, le concept de « désert médical » semble obsolète. La question n'est plus seulement de combler un vide géographique, mais de garantir un accès équitable à une offre de soins hybride, mêlant présence physique et solutions digitales. Ce rapport explore comment la France, à l'aune des expériences internationales, peut réinventer son modèle pour concilier innovation technologique, justice sociale et qualité des soins – sans sacrifier l'humain au profit de la machine.
Keywords: IA; HAD; Télémédecine; Déserts médicaux; Equité; Formation; Ethique (search for similar items in EconPapers)
Date: 2025-07-01
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Published in 2025
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