La médiation réparatrice: La restauration comme ré-instauration
Aude Montlahuc Vannod ()
Additional contact information
Aude Montlahuc Vannod: EMA - École, mutations, apprentissages - CY - CY Cergy Paris Université, LCSP (URP_7335) - Laboratoire de Changement Social et Politique - UPCité - Université Paris Cité
Post-Print from HAL
Abstract:
Programme : 9H30. Introduction – Présentation de la journée – Jean-Philippe Bouilloud, ESCP BS, « Eloge de la réparation » Matin : Réparer, une affaire de société Franck Couragier, Psychologue, Expert judiciaire, « Le moment judiciaire, une étape du processus de réparation psychique ? » Jean-Pierre Escriva, Université de Poitiers, « De l'humain réparé à l'humain augmenté : simple question de degré ? » Yann Boissières, Rabbin, MJLF, « Le tikoun olam : la réparation au cœur du religieux ». Déjeuner sur place 12h30-13h30 Après-midi : Réparer, corps et âmes Anne Vincent-Buffault, LCSP-UPC, "Réparer les ruines, du refoulement aux lieux de mémoire". Aude Montlahuc-Vannod, EPSS, Université de Cergy : « La médiation réparatrice : la restauration comme ré-instauration » Marion Armellino- Vallet, Psychologue, CERS, " La fragmentation psychique est-elle réparable ?" Catherine du Pontavice, Massothérapeute, « Toucher le corps pour le réparer » Argumentaire: " Réparer Qu'est-ce que réparer ? C'est retrouver un état antérieur, un espace de fonctionnement ou d'action considéré comme normal, préférable, premier, et tenu pour souhaitable. Dans son roman Réparer les vivants, Maylis de Kérangal fait d'une greffe du cœur la métaphore de nos préoccupations actuelles, celle du « prendre soin », du « care ». Que répare-t-on ? Soi-même, mais pas seulement, c'est aussi autrui, voire tout notre environnement. Du souci de soi à l'écologie, réparer c'est tenter de contrer « des ans l'irréparable outrage », c'est lutter contre l'entropie du temps et de ce qu'il fait aux corps comme aux choses, au monde comme aux âmes. Réparer le monde est dans la modernité un principe de responsabilité qui s'articule avec un enjeu temporel fort. C'est d'un côté tenter d'annuler le passé, de le compenser (justice réparatrice, restitution d'œuvres à des pays anciennement colonisés, …), et de l'autre se projeter, être en mesure de retrouver un fonctionnement nouveau ou un état satisfaisant. Toute réparation suppose un espoir, une projection positive dans l'avenir, une ouverture vers un futur appréhendé avec confiance. Mais il y a aussi ce qui se ressent comme irréparable, les morts violentes, les drames personnels et les deuils soudains. « Arrêtez les pendules, coupez le téléphone/ (…) Emballez la lune et démontez le soleil/ Videz les océans (…)/Car il ne peut plus rien arriver de bon désormais », nous dit Auden dans son célèbre Funeral Blues. Du fond du désespoir toute perspective est abolie – nulle réparation n'est envisageable dans ce cas. En psychanalyse la réparation est pour Mélanie Klein un « mécanisme par lequel le sujet cherche à réparer les effets sur son objet d'amour de ses fantasmes destructeurs » selon Laplanche et Pontalis, lesquels soulignent que Klein utilise différents mots en allemand dont les traductions en anglais vont de restitution à restauration et réparation. Le petit enfant découvre qu'il peut assumer sa culpabilité, donc devenir responsable, en cherchant à réparer ses accès de colère destructrices, sa jalousie brutale. La possibilité de réparation est donc une voie qui ouvre la place à l'autre, à sa « capacité de sollicitude » (Winnicott). Au quotidien, l'amour, l'amitié, les gestes de solidarité peuvent être aussi des modalités de réparation. Pendant longtemps les objets étaient réparés, réutilisés, recyclés, dans un processus que la modernité occidentale redécouvre avec l'économie circulaire et la préoccupation écologique. Les traditions de réparations peuvent être grandioses et éclatantes : au Japon la technique du Kintsugi souligne par un trait de laque et d'or les cassures d'objets en grès ou porcelaine, les transformant en objets nouveaux, dont la conception est in fine au croisement de l'objet initial et de sa confrontation destructrice avec la vie quotidienne. Loin de chercher à l'effacer, elle met en scène et magnifie l'événement destructeur, et confère à l'objet une autre valeur. Le paradoxe, c'est que la société de consommation a longtemps abandonné l'habitude de réparer les objets, comme de prendre soin de son environnement, alors même que les individus n'ont jamais eu autant besoin de se réparer eux-mêmes, corps et âmes, de la chirurgie réparatrice à toutes les pratiques de développement personnel et de psychothérapies. On pourrait voir dans ce rapport conflictuel à la réparation, à la fois pratique désuète mais besoin indispensable de la modernité, un signe du mal-être, ou d'un déni, de nos sociétés développées face aux enjeux du monde comme au destin des individus. Car arrive-t-on toujours à réellement « réparer » ? Le besoin de réparation, comme celui de consolation, n'est-il pas impossible à totalement satisfaire ? Accepter la mort comme irrémédiable, ce serait aussi commencer à penser, justement, les frontières du réparable et de l'irréparable… "
Date: 2025-04-10
References: Add references at CitEc
Citations:
Published in "Réparer", Journée d'Etude du CERS ( Centre de Recherches en Sociologie ), CERS ESCP BS; Jean-Philippe Bouilloud; Marion Armellino-Vallet; Anne Vincent-Buffault, Apr 2025, ESCP, Paris, France
There are no downloads for this item, see the EconPapers FAQ for hints about obtaining it.
Related works:
This item may be available elsewhere in EconPapers: Search for items with the same title.
Export reference: BibTeX
RIS (EndNote, ProCite, RefMan)
HTML/Text
Persistent link: https://EconPapers.repec.org/RePEc:hal:journl:hal-05040900
Access Statistics for this paper
More papers in Post-Print from HAL
Bibliographic data for series maintained by CCSD ().